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| [Emeraude] Larmes Ardentes (Mise à jour 19/03) | |
| Nefer
Dresseur
Nature : Prudent
Exp : 48
Pas de badges gagnés
| Sujet: [Emeraude] Larmes Ardentes (Mise à jour 19/03) Mar 18 Mar 2014 - 22:32 | |
| Larmes Ardentes Storylocke - Pokémon version Emeraude - John Nuzlocke a écrit:
Règles : 1) Le joueur ne peut attraper que le premier Pokémon sauvage qu'il rencontre dans chaque zone principale de la carte.
- Addenda à la règle n°1:
* Ceci ne concerne que les Pokémon pouvant être rencontrés aléatoirement dans les zones sauvages. Le joueur est libre de recevoir et utiliser les Pokémon qui lui sont offerts par des PNJ ou trouvés par des moyens non-conventionnels. * Les Légendaires peuvent être attrapés, mais pas utilisés. Ils ne sont pas inclus dans le décompte. * Les Shinies ne sont pas inclus dans le décompte et le joueur peut systématiquement les attraper.
2) Le joueur ne peut plus utiliser un Pokémon KO, il doit être considéré comme "mort" et relâché.
3) Le joueur doit débourser 100$ pour chaque Pokémon soigné dans un centre.
- Addenda à la règle n°3:
* Le joueur ne peut pas accéder au PC tant qu'il n'a pas fait soigner ses Pokémon dans un centre. * Le joueur ne peut utiliser qu'une seule fois dans la partie les autres méthodes de guérison (par exemple, se reposer à son domicile familial).
4) Tous les Pokémon doivent recevoir un surnom. Chapitre 01 - Chapitre 01:
Je m’apprête à agripper un carton rempli d’assiettes lorsque Maman me prend en flagrant délit. J’ai reposée mon autre bras sur la béquille, mais ça ne lui suffit pas.
« Nils, ne prend pas ça. Les Vigoroths s’en chargeront. » _ « Maman, je peux quand même transporter une foutue boîte / » _ « Pas de discussion. Va dans ta chambre, tu as des posters à accrocher ou je ne sais quoi. »
Je grimace en reposant le carton sur le bas de la camionnette. Je ne m’habituerai jamais à sa condescendance. Ni elle à la mienne.
« Si je n’ai rien d’utile à faire ici, je ferais aussi bien d’aller faire un tour, alors. » _ « Nils, tu n’as même pas vu l’intérieur de la maison ! Reviens ici tout de suite ! »
Je l’ignore et commence à partir – si jamais elle voulait vraiment se faire obéir, elle me suivrait. Elle n’aurait même pas à courir. En fait, elle n’aurait même pas à marcher bien loin, puisqu’il ne doit pas y avoir plus d’une cinquantaine de maisons dans tout Bourg-en-Vol. Au-delà de ça, tout n’est plus que champs à ciel ouvert et hautes herbes, routes poussiéreuses essémées à l’occasion d’une ou deux fleurs sauvages – très vite, toute trace de civilisation s’efface, et il ne vous reste plus qu’une fine odeur de pollen et la rumeur distante des grillons. L’endroit est vraiment très beau et serein, et c’est dommage, car j’ai encore vraiment, terriblement envie de détester ce fichu bled.
Qu’on ne se méprenne pas sur moi, ce n’est pas que j’étais fondamentalement opposé à l’idée de déménager à Hoenn au départ – Papa ne va quand même pas endosser son poste de nouveau Maître d’Arène à un millier de kilomètres de distance – mais j’aurais au moins apprécié d’être inclus dans la décision. Depuis qu’il a exaucé l’ambition de sa vie, il s’attend à ce que son euphorie contamine absolument tout le monde… sans jamais se demander si son bonheur fait véritablement le bonheur des autres. J’aime assez la campagne, mais pas pour y vivre – j’ai passé toute ma vie dans la plus grande ville de Johto et débarquer dans ce trou à Rattata n’éveille pas exactement mon enthousiasme. J’avais bien timidement suggéré à mes parents de plutôt nous installer à Clémenti-Ville, qui est d’ailleurs beaucoup plus proche de l’Arène de Papa, mais j’aurais tout aussi bien pu causer à un mur.
Résultat des courses, je boude. C’est très amusant, de bouder, et j’ai tendance à en abuser, mais ça demande aussi pas mal de concentration, et quand on entend un cri déchirant à quelques mètres de soi, c’est tout de suite fichu.
« HAAAAA !!! A L’AIDE !!! »
La voix, masculine, provient de quelque part derrière les arbres du côté gauche de la route, et je m’en approche sans trop réfléchir. Qu’est-ce que je fiche, exactement ? J’ai vu suffisamment de films d’épouvante ; c’est avec ce genre de comportement qu’on se fait tuer. Mais bon, je suis handicapé, techniquement, donc le tueur me laisserait probablement tranquille. Ou alors, on découvrirait que le tueur, c’est moi, et que j’ai fait semblant de boiter tout du long.
Ce n’est pas un tueur en série qui fait tout ce ramdam derrière les haies, néanmoins, mais bien quelque chose de tout aussi ennuyeux. C’est un Zigzaton sauvage poursuivant un homme entre deux âges, et qui respire de plus en plus lourdement.
« Hé ! Toi, là-bas, s’il te plaît ! Aide-moi ! »
Le pauvre type doit être en situation de stress – c’est que ça court vite, ces salauds, et puis ça mord, sans compter que ça transmet toutes les maladies infectieuses possibles et imaginables – mais le Pokémon n’arrive qu’à ses mollets, et il semble le faire tourner en boucle exprès. D’un point de vue extérieur, c’est difficile de ne pas sourire ; on dirait un Caninos qui essaie de se mordre la queue.
« Je suis censé faire quoi ? » J’ai laissé mon portable à la maison, et plutôt mourir que d’approcher cette sale bête. _ « Dans mon sac ! Il y a des Pokéballs ! »
Bon, d’accord, ce n’était pas à ça que je m’attendais.
Si le Zigzaton a remarqué ma présence, on ne peut pas dire qu’il s’en soucie beaucoup, et je parviens vite à retrouver la carcasse lacérée du sac à dos. Il y a en effet trois Pokéballs là-dedans – il ne me faut que quelques secondes d’hésitation avant de me décider sur celle marquée d’une gommette orange. Je presse le bouton et la jette tout près de moi – je ne peux pas m’attendre à ce que le Pokémon m’obéisse d’emblée et il y a toujours un risque qu’il soit décontenancé s’il débarque en plein milieu du combat.
Quoi qu’il en soit, c’est un jeune Poussifeu qui atterrit à mes pieds dans un éclair de lumière rougeâtre. Je n’en avais jamais vu de mes propres yeux, et il a l’air aussi surpris que moi.
« Oh ! » s’exclame-t-il. « Pourquoi le professeur joue-t-il aux chaises musicales ? Je peux essayer, moi aussi ? »
Mes craintes se confirment.
« Ecoute, je n’ai pas trop le temps de t’expliquer, mais ton maître est en danger. Sépare-les, vas-y ! » _ « Un combat ? » Les yeux du Poussifeu se teintent d’anxiété et d’excitation. « Oh, bon sang, c’est enfin arrivé… C’est quoi le protocole de bataille déjà ? Ah, oui, je me souviens : ON FONCE ! » _ « Non, attends / »
Trop tard ; le Poussifeu s’est mis à charger tête baissée, mais le Zigzaton l’a flairé bien avant. Il lâche momentanément sa proie et projette sa queue en plein sur sa tête. Il se fige sur place, visiblement désorienté, alors que le Zigzaton commence à grogner, les poils tout hérissés. Il y a un gros bleu au niveau de sa crête, là où il a reçu la queue en plein dans la figure, mais ce qui m’inquiète, c’est surtout son hésitation. Il n’y a pas de temps à perdre.
« Reconcentre-toi ! T’es plus rapide que lui ; il ne te mordra pas si tu ne le laisses pas. » _ « Vous… Vous pensez ? » _ « Je le pense, mais va falloir que tu me croies si tu veux y arriver ! »
Le Poussifeu ne répond pas, sans pour autant protester. Son corps se contracte, et il se décide enfin à lancer la contre-attaque. Le Zigzaton tente de l’acculer pour lui mordre les jambes, mais son bec se révèle bien plus véloce que ses crocs, et bientôt j’entends un petit cri de douleur, et il se replie. Je mets à profit ce répit temporaire pour m’inquiéter du sort de l’homme qu’il a attaqué :
« Ca va, monsieur ? » _ « Ca va, ça va, merci ! » dit-il, en repoussant quelques feuilles accrochées à sa blouse alors qu’il ramasse ce qu’il reste de son sac à dos. « On peut partir tout de suite si on pique un sprint. » _ « Alors ça, pas question. » Manifestement, il n’a pas encore capté que j’ai une béquille. « Je ne partirai pas avant que ce petit voyou ait appris sa leçon. Yo, Poussifeu ? T’as un nom ? » _ « Pas encore. Je suis censé être un cadeau pour la fille du professeur. » _ « Bon, passons un accord. Tu mets ce crétin en fuite et en échange je m’assurerai qu’ils te donnent un nom qui DECHIRE. Marché conclu ? » _ « Comment je vais faire ? Il est rapide ! » _ « Non, il est juste assez souple pour éviter tes attaques. Les Zigzatons, ils voient super mal en volume. Il ne te laissera pas passer derrière lui, mais si tu lui sautes dessus, il ne te verra pas venir. Je vais même t’aider, tiens. »
Je m’en saisis d’un coup et le lance dans les airs comme une Pokéball, dans la direction de son adversaire. Le Zigzaton a perçu mon mouvement, mais il a lâché des yeux le Poussifeu pendant quelques instants, ce qui se révèle une erreur fatale. L’oiseau atterrit parfaitement en plein sur son dos, et s’emploie promptement à le clouer au sol de son bec. Le Zigzaton couine de douleur, incapable de comprendre ce qui lui arrive. A peine quelques secondes de plus, et il s’étale ventre à l’air en position de soumission, surplombé par un Poussifeu triomphant.
« Tu peux t’arrêter, » lui lance son propriétaire. « Il ne nous embêtera plus. Allez viens, on rentre au labo ensemble. »
Le Zigzaton s’enfuit la queue entre ses courtes jambes et le Poussifeu nous revient, apparemment très fier de lui. Je n’ai rien de mieux à faire et je me propose donc de les accompagner. Nous échangeons quelques mots sur la route du retour vers Bourg-en-Vol ; il s’avère que nous allons être voisins, et qu’il exerce le métier de chercheur Pokémon sur le terrain.
« Tu t’es bien débrouillé aujourd’hui, » dit le Professeur Seko en félicitant le Poussifeu. « Toi aussi, Nils. Tu as déjà de l’expérience en combats de Pokémon ? » _ « Ben, heu, j’en possède pas encore, mais j’espère que mes parents me laisseront un jour. Et Papa est dresseur, alors du coup il m’a appris plein de trucs. » _ « Ah, je crois que je devrais te présenter ma fille, alors. Flora a ton âge et elle va bientôt commencer son voyage d’apprentissage – à dire vrai, je m’étais dit qu’il faudrait tester un peu les capacités de Poussifeu dans la nature avant de le lui offrir comme Pokémon de départ. On dirait que je ne me suis pas trompé. » _ « Eh ben, elle en a de la chance. » Maman pousserait des cris de Noarfang si j’osais ne serait-ce qu’envisager la possibilité de relever le Défi des Arènes. _ « Hé, Nils ? » Le Poussifeu me parle, un mètre plus bas. Pour une raison qui m’échappe, il a l’air fasciné par mon chapeau. « Je peux vous poser une question ? C’est quoi, un nom qui déchire, pour vous ? » _ « Heu, je ne voudrais pas influencer Flora. » _ « Oh, je t’en prie, influence-la, » m’interrompt le Professeur Séko. « Flora choisit toujours des noms qu’elle finit par regretter, de toute façon. On avait un Malosse à la maison dans le temps, et tu sais comment elle l’a appelé ? Rex. » _ « Voyons, je ne sais pas, pour un Poussifeu, heu… Vidofnir ? C’est un coq magique dans la mythologie nordique. » _ « Je n’ai jamais vu Mythologie Nordique à la télé, mais ça m’a l’air de déchirer, oui ! » _ « Si ça te plaît tant que ça, tu devrais en parler à Flora, alors. » Le Professeur Séko sourit gentiment. « On ne te demande pas d’être qui que ce soit d’autre que toi. » _ « Ouais, » je reprends. « Je veux pas me vanter, mais pour ce qui est d’être moi, je suis, genre, un expert mondial. »
Ils rient. Je n’aime toujours pas cet endroit, mais je pourrais au moins apprendre à apprécier les gens qui y vivent.
Chapitre 02 - Chapitre 02:
J’ai été très occupé, et pas qu’à accrocher des posters ; notre famille n’aurait jamais cru ramener autant de trucs de Johto, et pourtant notre nouvelle maison tient plus de l’entrepôt que d’autre chose. Le lendemain, les cartons sont encore omniprésents. Papa est retenu par les travaux dans l’arène de Clémenti-ville et n’a pas pu nous aider ; j’ai appris plus tard qu’il passait à la télé pendant que je prêtais main-forte au Professeur Séko. Papa à la télé ! Tout ça paraît tellement irréel…
« Ça sent le singe, dans cette baraque, » fait-elle en remuant le nez. « Tu es sûr d’avoir remis du déodorant ? » _ « C’est les Vigoroth d’hier, Maman. » Même le Monaflèmit de Papa n’a jamais été autorisé à mettre les pieds dans notre ancien appartement (hors de sa Pokéball, s’entend), et franchement, je n’en veux pas à Maman. C’est la meilleure peluche du monde, mais vraiment, il pue. « Bon ben, puisque tu es à peu près présentable, tu vas aller transmettre nos salutations aux voisins. Passe surtout le bonjour à la fille des Séko, plus vite tu recommenceras à socialiser, mieux ce sera. » Je déteste ses sarcasmes ; elle sait parfaitement que j’ai perdu plus de la moitié de mes potes après l’accident, et maintenant que je suis parti dans un autre pays, j’en ai désormais probablement perdu le peu qu’il me restait. _ « Où est ma chaise à porteur, Mère ? Vous savez bien que je suis totalement invalide. » _ « Arrête de faire le malin et va dehors. Tu préfères passer la journée à retirer des étiquettes d’emballage avec moi ? » Maman est avocate ; elle sait présenter de puissants arguments pour obtenir ce qu’elle veut. En avant pour la tournée du quartier, donc.
J’arrive chez les Séko et je tombe sur trois Pokémon en train de courir un peu partout ; il y a là un Arcko qui joue visiblement à cochon pendu sous un luminaire, un Gobou assez énervé de ne pas pouvoir l’atteindre et qui lui crie de redescendre, et le Poussifeu de l’autre jour. Il vient à ma rencontre tout de suite, très enthousiaste. Le Professeur Séko me salue, le nez plongé dans la paperasse à la table du salon. « Entre, entre ! Flora est dans sa chambre, si tu veux la voir. Je garde les Pokémon pendant qu’elle fait ses recherches / GOBOU, NON !!! Si tu lances de l’écume vers les équipements électriques, tu vas électrocuter Arcko ! Et d’ailleurs, descends, toi, tu vas te blesser. » Je le laisse à son baby-sitting et me dirige vers l’étage, talonné par le Poussifeu qui ne me lâche pas des yeux. Monter n’est pas une mince affaire pour lui, car il doit faire des grands sauts pour gravir chaque marche de l’escalier.
Je toque à une porte entrouverte. « Bonjour ! » Pas de réponse. Intrigué, je pénètre dans l’antre de Flora. J’ai rarement une chambre aussi mal et bizarrement rangée. Le bazar s’est tellement accumulé qu’elle s’est progressivement mise à empiler des tas d’objets hétéroclites dans certains coins, avant de renoncer à les ranger à leur tour. Les murs sont défigurés par une armada de post-it fluo, et le lit disparaît sous une excavation de coussins, de fringues et bouquins. Quelque part sur la gauche, je trouve Flora, une fille en bandana à l’aspect banal en train de lire sur l’ordinateur. Son casque diffuse une musique indescriptible et elle a les deux mains prostrées sur une bouteille de jus d’orange à peine entamée.
Je m’approche d’elle, reconnaissant sur l’écran la maquette du site de la Ligue Pokémon. « Bonjour, » dis-je d’une voix plus forte.
Flora pousse un hurlement de frayeur et s’élève d’un bond, renversant d’un coup la bouteille. Je m’écarte d’un réflexe, mais c’est le clavier qui fait les frais de l’inondation. La fille, paniquée, se confond dans un chapelet de jurons catastrophés.
« Ah ! Merde ! Putain. Oh, putain, je devrais pas dire de gros mots, merde… »
Je lui propose un mouchoir que j’ai sorti de ma poche. « Oh, merci, je ne suis pas enrhumée, » répond-t-elle en essayant désespérément de localiser un rouleau de papier absorbant. Avec horreur, je la vois jeter son dévolu sur un de ses tee-shirts. Je voudrais protester, mais c’est trop tard, et elle s’est déjà employée à essuyer frénétiquement la surface du bureau. « Pardon. Maintenant, c’est propre, » apparemment sans se rendre compte qu’elle a maintenant un tee-shirt gorgé de jus d’orange à gérer. « Tu veux boire quelque chose ? Je te sers un verre ? »
Tout mais pas ça ! « Non merci, Flora, » dis-je immédiatement. « Nils, » lui dis-je en tendant le bras. _ « Enchantée, » fait-elle, souriante, en avançant la main gauche, avant de réaliser qu’elle s’est gourée de côté. « Je m’appelle Flora ! » _ « Oui, je sais ça. » _ « Ah. Oui. Bien sûr, » dit-elle en détournant le regard absolument mortifié. Bon sang, cette fille s’est prise l’attaque « jet de sable » quinze fois de suite, ou quoi ? Je me sens obligé de la tirer de ce mauvais pas.
« Je vais habiter dans la maison voisine. J’ai vu ton père hier, il m’a dit que tu commences bientôt ton voyage d’apprentissage ? » _ « Oui ! C’est demain, en fait. Je suis très impatiente, » précise-t-elle sur le ton du suspect très impatient d’apprendre la décision du tribunal. « Mais il faut que je choisisse mon Pokémon de départ d’abord. Je ne dois pas me tromper. » _ « T’inquiète. Je ne sais pas pour les autres, mais j’ai vu ton Poussifeu à l’œuvre, il se débrouille bien. Hein, Poussifeu ? » Je le caresse sur la crête. Il fait son petit modeste, mais on voit bien qu’il est bouffi d’orgueil. _ « Heu… Tu pourrais le prendre avec toi ? » _ « Ah ? D’accord. » Je ramasse le Poussifeu, qui se love sous le creux de mon bras ; j’ai l’air de trimbaler un ballon de foot tout duveteux. Flora me regarde bizarrement, s’attendant à une réaction qui ne vient pas. Que me veut-t-elle ? _ « Non, mais, heu, je veux dire, le prendre avec toi, pour, heu, l’adopter, quoi. Qu’il soit TON Pokémon. Si tu veux, bien sûr. » _ « SERIEUX ? » Le Poussifeu et moi avons sorti ça en même temps. Il a l’air aux anges, Flora a l’air soulagée. De quoi j’ai l’air, moi ? « Mais enfin, Flora… Ce serait génial, mais tu es sûr que ça ne pose pas de problèmes ? Avec ton père, et tout ? » _ « Papa ? Non, des Pokémon de ce genre, il en a pleins de gratos pour lui et ses assistants. Ça fait partie de son fond de recherches. Tu n’aurais qu’un papier à signer. De toute façon, je ne vais qu’en prendre un des trois, alors il faudra bien trouver quelque chose à faire des deux autres. »
Je me tourne vers le Poussifeu. « Ça te dirait ? » Il a l’air un peu trop émoustillé pour répondre, alors il se contente de hocher frénétiquement du bec. « Bon, ben ce sera Vidofnir pour toi, alors. Par contre, il va vraiment falloir que tu me tutoies. Flora ? Il faut que je parle d’un truc à ton père. »
J’ai beau être euphorique, il y a quand même quelque chose qui me perturbe. On dirait presque que Flora essaye de se débarrasser à tous prix de ce Pokémon sur un autre dresseur… Ce qui n’a aucun sens puisqu’il a déjà largement prouvé sa discipline et sa capacité au combat. Et puis, il est quand même adorable. Je sais bien que tous les dresseurs disent ça de leur Pokémon, mais regardez-moi cette bouille ! Les filles, c’est censé aimer les trucs mignons, non ? Mais qu’importe ; comme dirait Papa, à Galopa donné, on ne regarde pas les dents. Si seulement ce conseil s’appliquait à ma mère… Je l’ai pourtant trouvée assez bienveillante en apprenant la nouvelle – ce n’est pas comme si j’avais six ans et que je ramenais à la maison un Tadmorv trouvé sur le bord de l’autoroute.
« Du coup, » et c’est là que je tente une approche à mes yeux subtile et diplomatique, « comme je viens d’avoir mon premier vrai Pokémon, je me demandais si ce n’était pas le bon moment pour reprendre la discussion. » _ « Quelle discussion ? » _ « Maman, je veux tenter le Voyage d’Apprentissage. »
Ma mère se fige ; je m’attends à ce qu’elle lâche un « QUOI ? » scandalisé, mais au lieu de cela, elle se dirige vers Vidofnir. « Excuse-nous un petit moment, » lui dit-elle d’un ton neutre, avant de le ramener dans sa Pokéball. Mauvais signe. Ma mère laisse planer un silence malsain avant de reprendre : « j’ai dû mal entendre. » _ « Maman, tout le monde le fait à mon âge. Même Flora. » Je me garde bien d’ajouter que je n’enverrais pas une fille aussi peu dégourdie dans la cambrousse. _ « C’est n’importe quoi. L’année scolaire reprend dans trois semaines, et on t’a déjà trouvé un Lycée. » _ « Tant mieux si je suis déjà inscrit, alors, ça m’évitera de le faire dans un an. Je prends juste une année sabbatique ! Ça fait bien sur les CV… En plus, le Professeur Séko a dit qu’il veut bien m’écrire une lettre de recommandation et me parrainer au statut de stagiaire ! Les sélectionneurs de l’Université adorent ces trucs ! » _ « Nils, arrêtons deux minutes de tourner autour du pot, tu veux ? » Ses sourcils se sont quasiment soudés à ses paupières. « Il ne s’agit pas de cela. Je m’inquiète pour ta jambe, sans parler du reste. Je ne crois pas que tu es en l’état de gambader dans la jungle pendant un an. Tu viens à peine de sortir de l’hôpital, il faut laisser ton corps souffler. Dans quelques années, on sera à même d’en reparler ÉVENTUELLEMENT. » _ « C’est drôle, parce que si j’ai bonne mémoire, aucun médecin ne m’a interdit de le faire, ce voyage d’apprentissage. » _ « Oui, eh bien ils ne te l’ont pas conseillé non plus. On en a déjà parlé, Nils, il faut te ménager et attendre de voir comment tout ça cicatrise. De toute façon, on t’a déjà interdit le sport. » « Mamaaaaaaan, c’est pas comme si j’étais OBLIGE de partir en trek non plus. Il y aussi des routes goudronnées à Hoenn, tu sais ? Il y a même des gosses en fauteuil roulant qui font ça. J’ai vu ça à la télé. »
Ma mère soupire ; je vois bien qu’elle a envie de trouver d’autres arguments, mais qu’elle aussi claquée par le déménagement. De guerre lasse, elle propose une trêve : « bon, de toute façon, il faudra en reparler quand ton père sera là. » Je sais qu’il dira oui ; Papa a arrêté l’école à quatorze ans pour partir sur les routes et devenir Maître Pokémon !
« L’école ne commence pas avant trois semaines de toute façon, » j’ajoute avec doigté, « et puis je n’ai pas encore de carte officielle de Dresseur. Je pourrais faire un peu de tourisme pendant le reste des vacances, avec Vidofnir. On sera toujours à même de faire le point d’ici quelques jours. D’ailleurs, Flora commence demain, donc je serai accompagné. » _ « Oui, oui, j’ai compris, tu as bien préparé ton coup, » fait-elle avec un maigre sourire. Elle relâche Poussifeu de sa Pokéball. « Tu devrais te méfier de celui-là, » lui lance-t-elle avant de repartir déballer ses verres à pieds en ruminant. Je m’étonne quand même qu’elle ait enterré la hache de guerre si vite.
J’ai passé le reste de la journée à tester les capacités de Vidofnir ; il ne sait pas encore embraser ses ennemis, mais il a de la motivation. Le professeur me montre les petites pierres de silex qu’il possède dans le fond du gosier. « Pratiquement tous les Pokémon de type Feu en possèdent, » m’explique-t-il. « Ils émettent d’abord un gaz inflammable, puis ils frottent ces deux pierres en contractant leur gorge pour faire des étincelles ! » Il est plutôt compétent quand il n’est pas confronté à des Pokémon sauvages, ce qui est dommage puisque son travail l’amène constamment à partir hors des sentiers battus. « Fais attention, lors des combats, à bien surveiller sa respiration. Pour lancer des flammes correctement, il lui faut du souffle. » Il me confie être plutôt soulagé de me voir garder un œil sur Flora ; sachant qu’elle se trimbale actuellement avec des lacets défaits, je le comprends.
J’ai laissé un message à Papa, qui a l’air manifestement très occupé. Est-ce que je commencerai à relever le Défi des Arènes, cette année ? Ce serait bizarre de l’affronter. Histoire de ne pas partir crevé demain, j’essaye de me coucher tôt, mais mon cerveau carbure à cent à l’heure et je ne parviens pas à trouver le sommeil. Quant à Vidofnir, je n’ai pas eu le cœur de le remettre dans la Pokéball et il s’est fait un nid dans les braises calcinées de la cheminée du salon ; ce n’est pas très chaud pour pioncer, mais ça a l’air de lui plaire.
Je m’endors sans m’en rendre compte, pourtant, et mes rêves prennent des allures de cauchemars. Je suis dans une pièce sans porte ni fenêtre, qui se remplit d’eau. Je ne sais ni d’où elle vient, ni la façon dont je me suis retrouvé ici. Je me débats dans un puits sans fond ; l’eau salée m’arrive aux oreilles, et je bois la tasse. Ce n’est pas de l’eau de mer, c’est autre chose. Tout s’agite, je peine à rester à la surface ; soudain, quelque chose ou quelqu’un m’agrippe depuis les profondeurs de la mer, et m’entraîne en apnée. Son contact brûle comme la braise, je hurle et la mer s’infiltre dans mes poumons ; je me réveille au beau milieu de la nuit, dans une confusion pleine d’eau et de feu.
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| | | Koukin
Écrivain
Nature : Prudent
Exp : 186
| Sujet: Re: [Emeraude] Larmes Ardentes (Mise à jour 19/03) Mer 19 Mar 2014 - 9:38 | |
| Très très très intéressant tout ça. Ton style est très bon, ni trop lourd ni trop léger. Les fautes sont rares (Maman pousserait des cries de Noarfang = pas de "e" à "cris" / « Tu peux t’arrêter, » l’appelle son propriétaire = "appeleé me semble faux par rapport à la situation. J'aurais mis "lui indiqua/" ou quelque chose dans le genre). J'ai beaucoup de mal avec les histoires qui font parler les pokémon dans la langue des humains mais c'est un choix de ta part auquel je devrais m'habituer.
Mais le plus important : poussifeu <3 |
| | | Kreattur
Artiste
Nature : Doux
Niveau : 25
Exp : 805
Pas de badges gagnés
| Sujet: Re: [Emeraude] Larmes Ardentes (Mise à jour 19/03) Mer 19 Mar 2014 - 11:24 | |
| J'aime bien ce début de 'fic, il n'est pas "lourdingue" (contrairement à ce que j'écris en général, j'ai tendance à surplombé en détails :/) et les combats sont très bien narrés. Koukin a souligné toutes les fautes d'orthographe, perso il y a un petit passage qui me dérange : "Le Zigzaton s’enfuit la queue entre les jambes (qu’il a courtes)" Je pense que dire "Le Zigzaton s’enfuit la queue entre les courtes jambes" serait plus français et plus compréhensibles non?^^ |
| | | MoonLight
Dresseur
Nature : Assuré
Niveau : 24
Exp : 147
| | | | Nefer
Dresseur
Nature : Prudent
Exp : 48
Pas de badges gagnés
| Sujet: Re: [Emeraude] Larmes Ardentes (Mise à jour 19/03) Mer 19 Mar 2014 - 16:32 | |
| Merci de votre soutien et des remarques positives/constructives, ça aide ! :o Content que ça vous plaise en tous les cas. @Koukin, @Kreattur : merci pour les coquilles, je corrige ça vite fait... - Koukin a écrit:
- J'ai beaucoup de mal avec les histoires qui font parler les pokémon dans la langue des humains mais c'est un choix de ta part auquel je devrais m'habituer.
Très intéressant comme sujet ça, je propose de développer dans un Topic consacré. Pour ce qui est de mon StoryLocke, en fait, à peu près 4% des êtres humains peuvent comprendre le langage Pokémon et le reste non. On les appelle les Empathes, c'est une capacité psychique latente qui "traduit" les mots dans l'esprit en simultané. Donc un Empathe entend un Pikachu dire "Pikapi," comme tout le monde, mais il comprend quand même plus ou moins ce que le Pokémon veut dire. Séko et Nils arrivent à converser avec Vidofnir parce qu'ils sont tous les deux Empathes, mais Flora et les parents de Nils ne le sont pas, par exemple. - Kreattur a écrit:
- J'aime bien ce début de 'fic, il n'est pas "lourdingue" (contrairement à ce que j'écris en général, j'ai tendance à surplombé en détails :/) et les combats sont très bien narrés.
Ecrire au présent de l'indicatif m'aide vachement de ce côté-là. Pour éviter le surplus de détails, je commence par écrire directement les moments-clés du récit et ensuite je me fixe une limite de mots. - Démoon a écrit:
- Sinon continue, et je te conseille de mettre tes chapitres en spoiler, sinon le topic sera trop long :3 !
Exécution ! Sinon, je mets le second chapitre pour ceux que ça intéresse : Chapitre 02 - Chapitre 02:
Chapitre 02 J’ai été très occupé, et pas qu’à accrocher des posters ; notre famille n’aurait jamais cru ramener autant de trucs de Johto, et pourtant notre nouvelle maison tient plus de l’entrepôt que d’autre chose. Le lendemain, les cartons sont encore omniprésents. Papa est retenu par les travaux dans l’arène de Clémenti-ville et n’a pas pu nous aider ; j’ai appris plus tard qu’il passait à la télé pendant que je prêtais main-forte au Professeur Séko. Papa à la télé ! Tout ça paraît tellement irréel…
« Ça sent le singe, dans cette baraque, » fait-elle en remuant le nez. « Tu es sûr d’avoir remis du déodorant ? » _ « C’est les Vigoroth d’hier, Maman. » Même le Monaflèmit de Papa n’a jamais été autorisé à mettre les pieds dans notre ancien appartement (hors de sa Pokéball, s’entend), et franchement, je n’en veux pas à Maman. C’est la meilleure peluche du monde, mais vraiment, il pue. « Bon ben, puisque tu es à peu près présentable, tu vas aller transmettre nos salutations aux voisins. Passe surtout le bonjour à la fille des Séko, plus vite tu recommenceras à socialiser, mieux ce sera. » Je déteste ses sarcasmes ; elle sait parfaitement que j’ai perdu plus de la moitié de mes potes après l’accident, et maintenant que je suis parti dans un autre pays, j’en ai désormais probablement perdu le peu qu’il me restait. _ « Où est ma chaise à porteur, Mère ? Vous savez bien que je suis totalement invalide. » _ « Arrête de faire le malin et va dehors. Tu préfères passer la journée à retirer des étiquettes d’emballage avec moi ? » Maman est avocate ; elle sait présenter de puissants arguments pour obtenir ce qu’elle veut. En avant pour la tournée du quartier, donc.
J’arrive chez les Séko et je tombe sur trois Pokémon en train de courir un peu partout ; il y a là un Arcko qui joue visiblement à cochon pendu sous un luminaire, un Gobou assez énervé de ne pas pouvoir l’atteindre et qui lui crie de redescendre, et le Poussifeu de l’autre jour. Il vient à ma rencontre tout de suite, très enthousiaste. Le Professeur Séko me salue, le nez plongé dans la paperasse à la table du salon. « Entre, entre ! Flora est dans sa chambre, si tu veux la voir. Je garde les Pokémon pendant qu’elle fait ses recherches / GOBOU, NON !!! Si tu lances de l’écume vers les équipements électriques, tu vas électrocuter Arcko ! Et d’ailleurs, descends, toi, tu vas te blesser. » Je le laisse à son baby-sitting et me dirige vers l’étage, talonné par le Poussifeu qui ne me lâche pas des yeux. Monter n’est pas une mince affaire pour lui, car il doit faire des grands sauts pour gravir chaque marche de l’escalier.
Je toque à une porte entrouverte. « Bonjour ! » Pas de réponse. Intrigué, je pénètre dans l’antre de Flora. J’ai rarement une chambre aussi mal et bizarrement rangée. Le bazar s’est tellement accumulé qu’elle s’est progressivement mise à empiler des tas d’objets hétéroclites dans certains coins, avant de renoncer à les ranger à leur tour. Les murs sont défigurés par une armada de post-it fluo, et le lit disparaît sous une excavation de coussins, de fringues et bouquins. Quelque part sur la gauche, je trouve Flora, une fille en bandana à l’aspect banal en train de lire sur l’ordinateur. Son casque diffuse une musique indescriptible et elle a les deux mains prostrées sur une bouteille de jus d’orange à peine entamée.
Je m’approche d’elle, reconnaissant sur l’écran la maquette du site de la Ligue Pokémon. « Bonjour, » dis-je d’une voix plus forte.
Flora pousse un hurlement de frayeur et s’élève d’un bond, renversant d’un coup la bouteille. Je m’écarte d’un réflexe, mais c’est le clavier qui fait les frais de l’inondation. La fille, paniquée, se confond dans un chapelet de jurons catastrophés.
« Ah ! Merde ! Putain. Oh, putain, je devrais pas dire de gros mots, merde… »
Je lui propose un mouchoir que j’ai sorti de ma poche. « Oh, merci, je ne suis pas enrhumée, » répond-t-elle en essayant désespérément de localiser un rouleau de papier absorbant. Avec horreur, je la vois jeter son dévolu sur un de ses tee-shirts. Je voudrais protester, mais c’est trop tard, et elle s’est déjà employée à essuyer frénétiquement la surface du bureau. « Pardon. Maintenant, c’est propre, » apparemment sans se rendre compte qu’elle a maintenant un tee-shirt gorgé de jus d’orange à gérer. « Tu veux boire quelque chose ? Je te sers un verre ? »
Tout mais pas ça ! « Non merci, Flora, » dis-je immédiatement. « Nils, » lui dis-je en tendant le bras. _ « Enchantée, » fait-elle, souriante, en avançant la main gauche, avant de réaliser qu’elle s’est gourée de côté. « Je m’appelle Flora ! » _ « Oui, je sais ça. » _ « Ah. Oui. Bien sûr, » dit-elle en détournant le regard absolument mortifié. Bon sang, cette fille s’est prise l’attaque « jet de sable » quinze fois de suite, ou quoi ? Je me sens obligé de la tirer de ce mauvais pas.
« Je vais habiter dans la maison voisine. J’ai vu ton père hier, il m’a dit que tu commences bientôt ton voyage d’apprentissage ? » _ « Oui ! C’est demain, en fait. Je suis très impatiente, » précise-t-elle sur le ton du suspect très impatient d’apprendre la décision du tribunal. « Mais il faut que je choisisse mon Pokémon de départ d’abord. Je ne dois pas me tromper. » _ « T’inquiète. Je ne sais pas pour les autres, mais j’ai vu ton Poussifeu à l’œuvre, il se débrouille bien. Hein, Poussifeu ? » Je le caresse sur la crête. Il fait son petit modeste, mais on voit bien qu’il est bouffi d’orgueil. _ « Heu… Tu pourrais le prendre avec toi ? » _ « Ah ? D’accord. » Je ramasse le Poussifeu, qui se love sous le creux de mon bras ; j’ai l’air de trimbaler un ballon de foot tout duveteux. Flora me regarde bizarrement, s’attendant à une réaction qui ne vient pas. Que me veut-t-elle ? _ « Non, mais, heu, je veux dire, le prendre avec toi, pour, heu, l’adopter, quoi. Qu’il soit TON Pokémon. Si tu veux, bien sûr. » _ « SÉRIEUX ? » Le Poussifeu et moi avons sorti ça en même temps. Il a l’air aux anges, Flora a l’air soulagée. De quoi j’ai l’air, moi ? « Mais enfin, Flora… Ce serait génial, mais tu es sûr que ça ne pose pas de problèmes ? Avec ton père, et tout ? » _ « Papa ? Non, des Pokémon de ce genre, il en a pleins de gratos pour lui et ses assistants. Ça fait partie de son fond de recherches. Tu n’aurais qu’un papier à signer. De toute façon, je ne vais qu’en prendre un des trois, alors il faudra bien trouver quelque chose à faire des deux autres. »
Je me tourne vers le Poussifeu. « Ça te dirait ? » Il a l’air un peu trop émoustillé pour répondre, alors il se contente de hocher frénétiquement du bec. « Bon, ben ce sera Vidofnir pour toi, alors. Par contre, il va vraiment falloir que tu me tutoies. Flora ? Il faut que je parle d’un truc à ton père. »
J’ai beau être euphorique, il y a quand même quelque chose qui me perturbe. On dirait presque que Flora essaye de se débarrasser à tous prix de ce Pokémon sur un autre dresseur… Ce qui n’a aucun sens puisqu’il a déjà largement prouvé sa discipline et sa capacité au combat. Et puis, il est quand même adorable. Je sais bien que tous les dresseurs disent ça de leur Pokémon, mais regardez-moi cette bouille ! Les filles, c’est censé aimer les trucs mignons, non ? Mais qu’importe ; comme dirait Papa, à Galopa donné, on ne regarde pas les dents. Si seulement ce conseil s’appliquait à ma mère… Je l’ai pourtant trouvée assez bienveillante en apprenant la nouvelle – ce n’est pas comme si j’avais six ans et que je ramenais à la maison un Tadmorv trouvé sur le bord de l’autoroute.
« Du coup, » et c’est là que je tente une approche à mes yeux subtile et diplomatique, « comme je viens d’avoir mon premier vrai Pokémon, je me demandais si ce n’était pas le bon moment pour reprendre la discussion. » _ « Quelle discussion ? » _ « Maman, je veux tenter le Voyage d’Apprentissage. »
Ma mère se fige ; je m’attends à ce qu’elle lâche un « QUOI ? » scandalisé, mais au lieu de cela, elle se dirige vers Vidofnir. « Excuse-nous un petit moment, » lui dit-elle d’un ton neutre, avant de le ramener dans sa Pokéball. Mauvais signe. Ma mère laisse planer un silence malsain avant de reprendre : « j’ai dû mal entendre. » _ « Maman, tout le monde le fait à mon âge. Même Flora. » Je me garde bien d’ajouter que je n’enverrais pas une fille aussi peu dégourdie dans la cambrousse. _ « C’est n’importe quoi. L’année scolaire reprend dans trois semaines, et on t’a déjà trouvé un Lycée. » _ « Tant mieux si je suis déjà inscrit, alors, ça m’évitera de le faire dans un an. Je prends juste une année sabbatique ! Ca fait bien sur les CV… En plus, le Professeur Séko a dit qu’il veut bien m’écrire une lettre de recommandation et me parrainer au statut de stagiaire ! Les sélectionneurs de l’Université adorent ces trucs ! » _ « Nils, arrêtons deux minutes de tourner autour du pot, tu veux ? » Ses sourcils se sont quasiment soudés à ses paupières. « Il ne s’agit pas de cela. Je m’inquiète pour ta jambe, sans parler du reste. Je ne crois pas que tu es en l’état de gambader dans la jungle pendant un an. Tu viens à peine de sortir de l’hôpital, il faut laisser ton corps souffler. Dans quelques années, on sera à même d’en reparler ÉVENTUELLEMENT. » _ « C’est drôle, parce que si j’ai bonne mémoire, aucun médecin ne m’a interdit de le faire, ce voyage d’apprentissage. » _ « Oui, eh bien ils ne te l’ont pas conseillé non plus. On en a déjà parlé, Nils, il faut te ménager et attendre de voir comment tout ça cicatrise. De toute façon, on t’a déjà interdit le sport. » « Mamaaaaaaan, c’est pas comme si j’étais OBLIGE de partir en trek non plus. Il y aussi des routes goudronnées à Hoenn, tu sais ? Il y a même des gosses en fauteuil roulant qui font ça. J’ai vu ça à la télé. »
Ma mère soupire ; je vois bien qu’elle a envie de trouver d’autres arguments, mais qu’elle aussi claquée par le déménagement. De guerre lasse, elle propose une trêve : « bon, de toute façon, il faudra en reparler quand ton père sera là. » Je sais qu’il dira oui ; Papa a arrêté l’école à quatorze ans pour partir sur les routes et devenir Maître Pokémon !
« L’école ne commence pas avant trois semaines de toute façon, » j’ajoute avec doigté, « et puis je n’ai pas encore de carte officielle de Dresseur. Je pourrais faire un peu de tourisme pendant le reste des vacances, avec Vidofnir. On sera toujours à même de faire le point d’ici quelques jours. D’ailleurs, Flora commence demain, donc je serai accompagné. » _ « Oui, oui, j’ai compris, tu as bien préparé ton coup, » fait-elle avec un maigre sourire. Elle relâche Poussifeu de sa Pokéball. « Tu devrais te méfier de celui-là, » lui lance-t-elle avant de repartir déballer ses verres à pieds en ruminant. Je m’étonne quand même qu’elle ait enterré la hache de guerre si vite.
J’ai passé le reste de la journée à tester les capacités de Vidofnir ; il ne sait pas encore embraser ses ennemis, mais il a de la motivation. Le professeur me montre les petites pierres de silex qu’il possède dans le fond du gosier. « Pratiquement tous les Pokémon de type Feu en possèdent, » m’explique-t-il. « Ils émettent d’abord un gaz inflammable, puis ils frottent ces deux pierres en contractant leur gorge pour faire des étincelles ! » Il est plutôt compétent quand il n’est pas confronté à des Pokémon sauvages, ce qui est dommage puisque son travail l’amène constamment à partir hors des sentiers battus. « Fais attention, lors des combats, à bien surveiller sa respiration. Pour lancer des flammes correctement, il lui faut du souffle. » Il me confie être plutôt soulagé de me voir garder un œil sur Flora ; sachant qu’elle se trimbale actuellement avec des lacets défaits, je le comprends.
J’ai laissé un message à Papa, qui a l’air manifestement très occupé. Est-ce que je commencerai à relever le Défi des Arènes, cette année ? Ce serait bizarre de l’affronter. Histoire de ne pas partir crevé demain, j’essaye de me coucher tôt, mais mon cerveau carbure à cent à l’heure et je ne parviens pas à trouver le sommeil. Quant à Vidofnir, je n’ai pas eu le cœur de le remettre dans la Pokéball et il s’est fait un nid dans les braises calcinées de la cheminée du salon ; ce n’est pas très chaud pour pioncer, mais ça a l’air de lui plaire.
Je m’endors sans m’en rendre compte, pourtant, et mes rêves prennent des allures de cauchemars. Je suis dans une pièce sans porte ni fenêtre, qui se remplit d’eau. Je ne sais ni d’où elle vient, ni la façon dont je me suis retrouvé ici. Je me débats dans un puits sans fond ; l’eau salée m’arrive aux oreilles, et je bois la tasse. Ce n’est pas de l’eau de mer, c’est autre chose. Tout s’agite, je peine à rester à la surface ; soudain, quelque chose ou quelqu’un m’agrippe depuis les profondeurs de la mer, et m’entraîne en apnée. Son contact brûle comme la braise, je hurle et la mer s’infiltre dans mes poumons ; je me réveille au beau milieu de la nuit, dans une confusion pleine d’eau et de feu.
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| | | 1nsanity
Dresseur
Nature : Malpoli
Niveau : 28
Exp : 1193
| Sujet: Re: [Emeraude] Larmes Ardentes (Mise à jour 19/03) Mer 19 Mar 2014 - 22:47 | |
| Yep c'est sympa,j'adhère.Par contre pour ta réflexion sur les films d'épouvante,en fan du genre - Spoiler:
dans massacre à la tronçonneuse(oui je sais c'est un slasher)un des héros est handicapé et c'est pas pour autant qu'il meurt pas d'ailleurs petit détail marrant - Spoiler:
c'est le seul perso du film tué par une tronçonneuse,comme quoi ils auraient mieux fait de garder"Texas Chainsaw Massacre"
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| | | Nefer
Dresseur
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| | | | | [Emeraude] Larmes Ardentes (Mise à jour 19/03) | |
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