Le soleil commençait à peine à se diriger vers le Sud quand Saphir et sa team parvinrent finalement à trouver la sortie du Bois Clémenti. Ils arrivèrent dans une large plaine entourée d’arbres, avec seulement une baraque en bois peinturée de vert au loin. Un panneau indiqua à la jeune Dresseuse qu’elle se trouvait toujours sur la Route 104 ; par conséquent, capturer un Pokémon ici était contre la loi, puisqu’elle avait déjà récupéré un de ses compagnons sur cette même route plus tôt. Combien de Dresseurs avaient pu se faire avoir en pensant qu’ils avaient atteint une autre route, alors que le bois séparait la Route 104 en deux parties ? Certainement plusieurs.
A la demande de ses Pokémon type Plante – et sans doute de Flutter aussi, vu comme elle s’agitait sur le nénuphar de Miguel – quand ils virent tous les pots de fleurs et de baies entourant la baraque en bois, l’équipe fit un détour par cette dernière. Sur une pancarte à l’extérieur était écrit « Fleuriste Jolie Fleur », et sans surprise, quand Saphir pénétra à l’intérieur, elle fut accueillie par le doux parfum des plantes et des arbres à baies. Elle n’était pas intéressée par le jardinage, mais Marco, Miguel, Flutter et Truffle semblaient enchantés par l’environnement. Trois femmes s’occupaient de la boutique ; l’une d’entre elles lui donna une baie gratuite en gage d’échantillon et une deuxième un arrosoir si jamais il lui venait l’envie de faire pousser des baies durant son aventure.
L’équipe reparti peu de temps après en direction de Mérouville dont les immeubles grossissaient au loin à mesure qu’ils approchaient. Ils croisèrent d’autres Dresseur sur le chemin puis traversèrent un lac grâce à un énorme pont de bois construit par-dessus et arrivèrent à l’entrée de la ville, dont l’activité pouvait déjà se faire entendre. Maintenant qu’ils se trouvaient en lieu très bondé, Saphir décida qu’il était plus prudent de rappeler ses Pokémon dans leurs PokéBall. Seul Marco pouvait être dehors à condition qu’il reste sur ses épaules.
Il était bientôt midi ; Saphir voulait atteindre le Centre Pokémon rapidement pour bénéficier d’un lieu où manger et se reposer à sa guise, en espérant qu’à cette heure-ci et dans cette ville chargée d’activité il n’y ait pas déjà trop de monde. En s’enfonçant dans les rues, elle fut confrontée à de plus en plus de piétons et de véhicules dont les voix et les bruits de moteurs commençaient à l’assourdir. Normalement, elle n’y aurait pas fait plus attention ; mais sa tête commença soudainement à tambouriner. En grimaçant, elle passa une main sur la tempe où se trouvait son implant, là où la douleur était plus vive. Marco remarqua tout de suite que quelque chose n’allait pas.
–
Tout va bien ? demanda-t-il ; elle parvint à le comprendre, mais sa voix semblait étrangement distordue.
– Oui, ça va, répondit-elle pour ne pas l’inquiéter, en fronçant tout de même les sourcils.
L’implant avait donc un autre défaut, apparemment. Elle se demanda si l’activité de la ville et les bruits que cela causait créaient des interférences avec l’appareil. En attendant, cela commençait vraiment à lui faire mal au crâne et elle se dépêcha de rejoindre le Centre Pokémon, espérant atterrir dans un lieu calme.
Heureusement pour elle, l’endroit était plus spacieux que les autres Centre Pokémon où elle s’était reposée auparavant, sûrement pour accueillir plus de monde. Il y avait plusieurs Dresseurs assis sur les fauteuils, attendant de pouvoir récupérer leurs Pokémon, mais une grande majorité se trouvait déjà dans le coin cafétéria. Saphir fit rentrer Marco dans sa PokéBall et confia son équipe à une infirmière pour un checkup rapide de leur état de santé. Elle poussa un soupir en massant sa tempe, prenant soin de ne pas toucher l’implant ; la douleur commençait à partir petit à petit, mais elle avait encore la tête lourde.
– Saphir ! Hé !
Surprise qu’on l’appelle, elle scanna le lieu à la recherche de son interlocuteur ; elle le trouva assis sur un divan, lui faisant des signes de la main. Elle le reconnu immédiatement ; c’était Rubis. Il avait ôté son drôle de bonnet et l’avait placé sur les genoux.
Saphir s’approcha du jeune garçon qui lui fit immédiatement de la place pour qu’elle puisse s’asseoir à côté de lui.
– Salut Rubis, salua-t-elle en prenant place.
– Salut ! Comment vas-tu ? demanda-t-il avec un grand sourire, certainement content de voir un visage familier.
– Bien... même si j’ai un énorme mal de crâne, dit-elle en pointant son implant du doigt. J’ai l’impression que ce truc à quelque chose à voir avec ça.
– Ha ! Toi aussi ? dit-il en passant une main du côté où se trouvait son minuscule traducteur. Ça m’a fait pareil ; dès que je suis entré en ville, j’ai eu un mal de crâne énorme. Au bout d’un moment, il a même cessé de me traduire ce que Phoenix me disait. J’ai eu un peu peur qu’il se soit cassé, mais quand je suis arrivé ici, il s’est remis à fonctionner normalement.
– Il faudrait peut-être appeler ton père pour lui en parler, non ?
– Déjà fait ; il m’a dit que les bureaux de la Devon SARL se trouvaient dans le coin et que je devrais y faire un tour pour leur en parler. Bon, on verra ça plus tard ! Parlons plutôt de Pokémon ; tu as réussi à en capturer sur la route ?
Saphir fit un signe de la tête en direction du comptoir où les infirmières s’occupaient de leurs bestioles.
– J’ai une équipe complète, lui dit-elle. Mais ça veut dire que je ne peux pas prendre plus de Pokémon avec moi.
– Mais tu sais que tu peux toujours en capturer, n’est-ce pas ? l’interrogea Rubis en arquant un sourcil. Tu sais que tu peux stocker les Pokémon en trop dans ton système de stockage Pokémon ?
– Oui, bien sûr, répondit-elle en roulant des yeux, comme si la chose était évidente. J’ai lu les codes du Dresseur avant de partir. C’est juste que je ne comprends pas trop ce système de PC où l’on stock les Pokémon qu’on n’utilise pas ; j’ai juste vu comment ça fonctionnait une fois quand j’étais petite.
Le visage de Rubis s’illumina.
– Ça tombe bien, je m’y connais en système de stockage Pokémon ! déclara-t-il. Viens, je vais te montrer !
Il se leva du divan pour se diriger vers les PCs, installés dans un coin du Centre Pokémon, Saphir à ses talons. Il alluma l’un des appareils ; sur l’écran s’afficha alors plusieurs options, comme téléphoner, accéder aux news de la région ou encore accéder au système de stockage Pokémon. C’est cette dernière option que Rubis sélectionna. Le PC lui demanda alors d’entrer son code Dresseur.
– Comme tu peux le voir, cette option n’est valable que pour les Dresseurs officiels, dit Rubis en sortant son Pokédex pour accéder à ses données de Dresseur. A chaque fois qu’un nouveau code Dresseur est créé, on lui attribue plusieurs boîtes de stockage personnelles dans le système pour y mettre les Pokémon en trop.
Une fois le code Dresseur entré, l’écran afficha un texte saluant Rubis Seko, montrant que le code Dresseur permettait aussi au système de connaitre l’identité de la personne. Dans un monde ultra-connecté, cela faisait sens, mais Saphir se demandait si toutes leurs données étaient bel et bien protégées comme il se devait.
Le message de salutation laissa ensuite place à plusieurs sortes de pages carrées, avec en haut le mot « Boîte », chacune numérotée.
– Voilà les boîtes, continua Rubis. A chaque fois que tu capture un Pokémon alors que tu en as déjà six avec toi, il te suffit de placer sa PokéBall dans le transporteur ici, ajouta-t-il en pointant une sorte de tube découpe d’une ouverture juste à côté du PC. Il va le détecter et te demander dans quelle boîte tu veux le téléporter, et hop ! Le voilà dans le PC.
– D’accord... mais ce n’est pas un peu bizarre ? s’étonna sa voisine. Comment est-ce qu’un être vivant peut-il se retrouver dans un monde virtuel ?
– Euh... je t’avoue que je ne sais pas plus que toi comment ça fonctionne exactement, s’excusa le jeune garçon. Il n’y a que les gérants du système de stockage qui savent. Je crois que tu as déjà entendu parler de Léo, le premier à avoir mis en place un système de stockage pour la région de Kanto ? Eh bien il est parvenu à convertir l’énergie des Pokémons en data pour être stockée dans un environnement numérique. Il a ensuite partagé cette connaissance avec d’autres férus de technologie pour créer un système de stockage international, avec un modérateur pour chaque région.
– Ok, je vois, murmura Saphir. Mais les codes du dresseur ne parlaient pas de ce qui arrivait aux Pokémon une fois là-dedans.
– Apparemment, ils se retrouvent dans un environnement virtuel selon le design que tu as donné à la boîte ; par exemple, ma première boîte ressemble à une plaine, donc ils évoluent dans une plaine virtuelle. Quant aux Pokémon, comme ils se retrouvent sous forme de datas, ils n’ont plus de besoins comme la faim et le sommeil et peuvent juste s’amuser ensemble.
– Et ils peuvent rester stocké à l’intérieur du système pour l’éternité ?
– Bin, en théorie, oui, dit Rubis, et en voyant le regard choqué de Saphir, il s’empressa de rajouter ; mais tu te doutes bien que les modérateurs et les Ligues surveillent l’usage du système de très près ! Les Pokémon peuvent y rester seulement pour un certain temps, et s’ils voient qu’un Pokémon n’a pas été retiré du système de stockage depuis un moment, ils sont dans le droit de le retirer eux-mêmes. Ensuite, ils contactent le Dresseur pour savoir s’il veut récupérer le Pokémon ou s’il veut le relâcher, puisqu’il ne l’utilise pas. En procédant ainsi, ça évite que des gens collectionnent les Pokémon juste pour le plaisir et l’utilisation abusif du système de stockage, et les Pokémon ne sont pas coincés à vie sous forme de données numériques.
– D’accord, je vois, dit Saphir en tournant la tête vers son voisin. C’est que tu en connais pas mal sur le fonctionnement du système.
Les joues de Rubis rosirent.
– Ah, ouais, hé, hé, merci ! bredouilla-t-il. Je veux dire, je suis le fils du Professeur Pokémon de Hoenn, donc c’est normal que je sois un peu branché là-dessus.
– Par contre, est-ce que c’est normal que tes boîtes soient vides ? demanda la jeune fille tandis qu’il éteignait le PC. Tu n’as pas capturé de Pokémon sur la route ?
– Hum... si... juste un seul, soupira le jeune garçon. Disons que Phoenix est assez... sélectif quand il s’agit de choisir des coéquipiers. Tous les Pokémon sauvages qu’on rencontre, il les met K.O ou les fait fuir avant que j’aie le temps de lancer une PokéBall ! J’ai beau lui dire d’arrêter, il refuse d’obéir !
– Waouh, il a un sacré caractère, remarqua Saphir, remerciant silencieusement Marco d’être un
starter adorable comparé au Poussifeu de son voisin.
– J’espère vraiment que c’est juste une phase, marmonna le garçon. Enfin, qu’importe, je ne cherche pas à avoir une équipe énorme non plus. Être un Dresseur fort qui affronte les Champions d’Arène ne m’intéresse pas ; je préfère assister mon père dans ses recherches. En revanche, toi, est-ce que tu comptes affronter Roxanne ?
Il fallut quelques secondes à Saphir pour se souvenir que c’était le nom de la Championne de Mérouville, si ce que lui avait raconté Norman était exact. Elle hocha de la tête.
– Alors je viendrais te voir ! assura Rubis, le sourire aux lèvres. J’ai fini ce que j’avais à faire dans le coin, du coup j’ai pas mal de temps libre.
– Oh... euh... Ce n’est pas la peine tu sais... bredouilla Saphir.
– J’insiste ! Après tout, toi et moi on est amis, pas vrai ?
Elle avala sa salive de travers, gênée par ces propos.
Rubis n’était pas un garçon méchant. Il était même très enthousiaste, plein de bons conseils et près à donner un coup de main en cas de besoin. Mais dire qu’il était un ami ? Non, c’était beaucoup trop tôt. Les gens qu’elle considérait ses amis se trouvaient à Kanto, loin d’elle ; des camarades de classe avec qui elle avait grandi, des filles avec qui elle avait organisé plusieurs soirées pyjama, des garçons qui pouvaient parfois l’embêter mais qui était toujours là si elle avait besoin d’eux... Rubis était son nouveau voisin. Une connaissance. Ni plus, ni moins. Elle ne savait même pas s’il serait capable un jour de combler ce qu’elle avait dû laisser derrière elle en venant vivre à Hoenn.
Mais tout ceci, elle le garda pour elle. Quand les infirmières les appelèrent pour récupérer leurs Pokémon, elle songea au fait que, pour l’instant, seuls ses Pokémon pouvaient vraiment compter pour des amis.
•••
Après un repas en compagnie de Rubis, les deux se séparèrent. Tandis que le jeune garçon partit visiter les bureaux de la Devon SARL pour partager ses premières impressions du traducteur qu’on leur avait implanté, Saphir s’en alla à l’autre bout de la ville où se trouvait à priori la Route 116. Sur le chemin, elle passa devant une école des Dresseurs, fermées puisque c’était la période estivale. Elle et Émeraude étaient toujours allé dans des écoles publiques, où ils recevaient aussi des cours sur les Pokémon, mais cette matière n’était pas aussi poussée que dans les écoles de Dresseurs où tout le cursus des élèves tournait autour de ça. De plus, les élèves y recevaient leur premier Pokémon à leur entrée pour les aider à s’entraîner et à se préparer pour leur futur voyage initiatique. Par rapport aux adolescents venant des écoles publiques, ils avaient donc l’avantage d’avoir plus de connaissance en la matière. Heureusement pour Saphir, ses parents avaient comblé les lacunes en lui montrant tout ce qu’ils savaient sur le dressage de Pokémon.
Elle fit un détour par la boutique pour acheter quelques produits et atteignit la Route 116 en quelques minutes. A cette heure-ci, entre midi et deux, les rues étaient plus calmes. Elle n’eut pas de migraine comme durant la matinée, ce dont elle fut bien contente. Elle libéra toute son équipe et les regarda droit dans les yeux.
– Je veux qu’on puisse défier Roxanne, la Championne d’Arène de Mérouville, avant ce soir, leur dit-elle. D’après ce que Rubis m’a dit, elle est spécialisée en type Roche ; ça veut donc dire que Marco, Truffle et Miguel devront mettre les bouchées double. Vous vous en pensés capables ?
Ils hochèrent de la tête. Sous la surveillance de leur Dresseuse, ils se dispersèrent pour s’entrainer. En suivant Miguel et Flutter, Saphir vit avec fierté que le Nénupiot aidait la petite Armulys à se renforcer ; pendant que, stabilisée sur son nénuphar, elle envoyait des attaques Sécrétion pour bloquer leurs adversaires, il finissait le travail avec des attaques Vol-Vies ou Etonnements. A un certain moment, après avoir combattu une drôle de créature rosâtre, ils se détournèrent de ce dernier sans avoir vérifié s’il était bien K.O. Comme il bougeait encore mais était faible, Saphir envoya une PokéBall dans sa direction, capturant ainsi un Pokémon nommé Chuchmur qu’elle baptisa Brouhaha. Avant d’affronter Roxanne, il lui faudrait envoyer sa nouvelle capture dans le système de stockage.
Elle laissa Miguel et Flutter à leur occupation pour vérifier comment se portait les autres. Marina et Rocket avaient décidé, pour leur part, de s’entraîner ensemble. Le Zigzaton était tout de même énervé que sa coéquipière puisse éviter ses attaques rien qu’avec un coup d’aile, ce dont elle s’amusait beaucoup. Saphir secoua la tête, un petit sourire aux lèvres. Elle était heureuse de voir qu’une grande camaraderie s’installait au sein de son équipe.
Se détournant pour chercher ses deux Pokémon manquants, elle les trouva un peu plus loin. Truffle surtout se donnait à fond, sans doute par volonté de rattraper le niveau des autres puisqu’elle était la plus récente capture de Saphir. A chaque fois qu’elle finissait une attaque, la Balignon se tournait vers l’Arcko pour lui demander son avis, même s’il ne possédait pas les mêmes capacités qu’elle. Le gecko vert continuait de l’encourager, ce qui semblait lui donner encore plus de motivation.
Le temps passa et Saphir mis finalement une fin à l’entraînement vers le milieu d’après-midi. Marco, Truffle, Rocket et Marina coururent vers elle aussitôt. Mais Miguel et Flutter ne revenaient pas. Inquiète, elle retourna à l’endroit où elle les avait laissés plus tôt, suivie de son équipe.
– Miguel ? appela-t-elle. Flutter ? Où êtes-vous ?
L’instant d’après, la silhouette d’une créature volante qu’elle n’eut pas le temps d’identifier s’écrasa sur son visage. Saphir fut si surprise qu’elle failli tomber en arrière, mais parvint à défaire la bestiole de sa tête pour l’examiner. Cela ressemblait à un papillon avec de belles grandes ailes colorées de noir, de rouge, de jaune et de bleu. Ses deux yeux azur l’observaient, amusés, et ses petites pattes s’agitèrent dans sa direction.
–
Wiiiiiii ! s’exclama le papillon.
– Euh... bonjour ? salua la Dresseuse, confuse ; ce Pokémon la connaissait ?
–
Ah ! Tu l’as attrapé ! s’exclama une autre voix, que Saphir reconnu immédiatement comme celle de Miguel, à ses pieds.
Elle observa le Nénupiot qui s’approchait, visiblement fatigué comme s’il avait couru un marathon.
–
Dès qu’elle a découvert qu’elle pouvait voler, elle a échappé à ma vigilance et s’est mise à aller dans tous les sens ! J’ai cru qu’elle allait fuguer !– Tu connais ce Pokémon ? s’étonna sa Dresseuse, le papillon toujours entre les mains.
–
Bien sûr ; c’est Flutter ! révéla le Nénupiot.
Toute l’équipe s’écria de surprise ; même Saphir qui ne s’attendait pas du tout à ce que sa Armulys évolue une fois de plus aussi vite. Leur incrédulité fit même rire cette dernière, ou en tout cas, elle semblait rire : si elle parvenait enfin à utiliser sa voix, elle restait toujours incompréhensible.
Saphir relâcha sa prise qui se mit à voleter autour d’elle pour lui montrer ses ailes vibrantes de couleurs. Elle tournoya dans les airs avant de revenir se poser sur le nénuphar de Miguel. Le pauvre Nénupiot s’était étalé sur le sol, mais il laissa sa drôle de coéquipière continuer à utiliser son couvre-chef naturel comme perchoir.
–
Ma parole, c’est qu’elle est pleine de surprise ! rit Marina.
–
Ouais, bin j’espère que c’était sa dernière évolution, grommela Rocket,
parce que ça commence à faire beaucoup de transformation en une journée !–
Allons Rocket, le sermonna gentiment Marco,
tu devrais être content pour elle. Tous les Pokémon ne parviennent pas à évoluer en si peu de temps, tu sais.Le Zigzaton grommela dans ses poils mais n’ajouta rien. Marco avait raison, c’était réjouissant de voir qu’au moins l’une d’entre eux avait atteint son stade final d’évolution. Son type Insecte devait certainement jouer dans la rapidité de sa transformation, mais au moins elle n’aurait plus de problème pour se mouvoir.
En retournant au Centre Pokémon pour checker son équipe une fois de plus avant le combat contre Roxanne et déposer Brouhaha dans le système de stockage, Saphir commença à mentalement forger un plan d’attaque. Elle décida de ne pas faire combattre Miguel et de plutôt se pencher sur Marco et Truffle. Cependant, tous les deux ne connaissaient que Vol-Vie comme attaque de type Plante. Ce n’était définitivement pas assez, surtout que les attaques des Pokémon consommaient de l’énergie et qu’il arrivait un moment où ils ne pouvaient plus s’en servir.
Heureusement, la jeune Dresseuse avait une botte secrète...
•••
L’Arène de Mérouville semblait bien imposante, maintenant que Saphir se tenait devant l’entrée. Jusqu’ici, elle n’avait ressenti aucune appréhension, mais voilà qu’à cet instant, alors que quelques pas seulement la séparaient de son objectif, son cœur tambourinait violemment dans sa poitrine. Sur ses épaules, Marco ne disait rien. Il devait être tout aussi anxieux.
Le plan était simple ; Truffle se chargerait des Pokémon les plus faibles. Ainsi, Marco garderait toute son énergie pour les adversaires les plus tenaces. Saphir n’avait aucune idée de quels Pokémon exactement l’attendaient derrière ces murs, mais tous étaient forcément de type Roche. Certains lui seraient probablement familiers, mais Hoenn était bourré de Pokémon qu’elle n’avait jamais vu à Kanto ; elle ferait sûrement face à une surprise à un moment ou un autre.
Réunissant toute sa volonté, elle pénétra finalement à l’intérieur de l’Arène. L’entrée ne ressemblait en rien à celle de Clémenti-Ville ; on aurait dit un mini-musée où étaient exposés, derrière des socles protégés par des vitres, des pierres de toutes les formes et de toutes les couleurs. Plus loin, la pièce changeait : les murs de marbres devenaient de la roche naturelle, le sol en carrelage se métamorphosait en un sol rocailleux, et des fossiles sortaient de la pierre. Leurs squelettes impressionnants dominaient notamment le terrain de l’Arène, situé plus loin.
Un homme, sans doute de la sécurité, s’approcha de Saphir, un appareil ressemblant à un scanner à la main.
– Salut ! Tu es là pour défier notre Championne ? demanda-t-il.
– Oui, c’est ça, affirma la jeune Dresseuse.
– Dans ce cas, il me faut ta carte Dresseur, s’il te plaît.
Elle ouvrit son PokéDex sur la page de sa carte et il passa son appareil par-dessus. Un petit « bip » retenti. L’homme hocha de la tête.
– Parfait ! Voici les règles avant de te lancer : sur le chemin pour atteindre Roxanne, tu vas d’abord devoir faire face à deux Dresseurs travaillant à l’Arène. Les objets de soin sont acceptés pour n’importe quel match. Compris ?
Elle hocha de la tête. Juste avant d’avoir pu faire un pas, les portes de l’Arène s’ouvrir à nouveau, laissant pénétrer un Rubis essoufflé.
– Hé ! salua-t-il entre deux respirations. Super ! Je suis arrivé à temps !
– Ah, un autre challenger ? s’étonna l’homme de la sécurité. Désolé, tu vas devoir attendre que cette Dresseuse ait fini avant de pouvoir te lancer.
– Oh, non, non ! En fait je suis là pour assister au match ! C’est possible ?
– Oui, il te suffit de prendre cette porte pour accéder aux gradins, répondit l’homme en pointant une porte derrière-lui. Mais interdiction de faire sortir des Pokémon de leurs PokéBalls si tu en as avec toi.
– Pas de souci ! Et Saphir, ajouta le garçon en se tournant vers sa voisine, tout sourire, bonne chance ! Je compte sur toi !
Elle le remercia et il disparut derrière la porte. Après quoi, Saphir commença son défi.
Les deux Dresseurs qu’elle croisa sur le chemin vers la Championne ne furent pas difficiles à battre. Truffle s’en chargea grâce à son attaque Vol-Vie qui mis immédiatement K.O tous leurs Racaillous – un Pokémon qui était aussi de type Sol, donc les attaques de type Plante s’en retrouvaient doublement efficaces. Elle aurait pu se réjouir de cette facilité, mais la victoire n’était pas encore assurée. Le véritable défi l’attendait droit devant.
Elle parvint au terrain de l’Arène : Roxanne se trouvait de l’autre côté, posture droite et air assuré, et un arbitre se tenait debout sur le côté. En tournant la tête, Saphir vit Rubis assis sur les gradins. Il lui fit un signe de la main.
– Bien le bonjour, challenger, salua la Championne, reprenant l’attention de la jeune fille. Je suis Roxanne, Championne de Mérouville et le premier défi de la Ligue d’Hoenn. Je suis impressionnée que tu sois arrivée jusqu’à moi aussi vite ; tes Pokémon doivent être bien entraînés.
Elle prit une PokéBall dans sa main.
– Mais je ne serais pas aussi facile à affronter que mes assistants, sache-le. Mon éducation s’est faite à l’école des Dresseurs et je compte mettre en pratique tout ce que j’ai appris là-bas. Si tu parviens à me battre, tu recevras ton premier Badge et tu seras en mesure de continuer ton défi de la Ligue. Alors, challenger, acceptes-tu de m’affronter ?
– J’accepte, répondit Saphir, s’emparant de la PokéBall de Truffle.
Les deux Pokémons furent envoyés au combat. Tout de suite, la Balignon utilisa à nouveau Vol-Vie contre le Racaillou de Roxanne. Comme la Championne l’avait laissé entendre, ses Pokémon étaient beaucoup plus coriace ; celui-ci ne fut pas immédiatement mis à terre. Il lança un Jet-Pierre contre son adversaire. Les blessures furent heureusement légères et Truffle surpassa finalement le Racaillou avec un énième Vol-Vie, et l’arbitre donna le point à la chalengeuse. Saphir analysa l’état de sa Balignon ; elle avait bien combattu jusqu’ici, mais il était évident, même en drainant l’énergie des autres, qu’elle commençait à fatiguer. Elle devait échanger.
Saphir rappela Truffle et fixa Marco qui, sur ses épaules, se tenait près à partir. Un signal silencieux lui suffit : il s’élança sur le terrain, juste au moment où Roxanne appela son deuxième Pokémon. Plus imposant que le Racaillou, fait de roche bleutée et doté d’une sorte de nez énorme, Saphir n’en avait jamais vu comme lui. Elle sortit son PokéDex avant que l’arbitre ne donne le feu vert pour continuer le match ; il s’agissait d’un Tarinor.
Quand l’arbitre donna finalement le départ, Saphir ne perdit pas un instant : elle ordonna à Marco d’utiliser Vol-Vie. Roxanne, elle, ordonna un Jet-Pierre. Le gecko vert fut plus rapide, mais il ne pu éviter l’attaque de son adversaire quand elle fut lancée. Il n’était pas trop amoché, mais il était évident que le Tarinor faisait plus de dommage que son partenaire Racaillou.
Saphir décida donc d’utiliser leur botte secrète.
– Balle-Graine ! ordonna-t-elle.
Sur la Route 104, un Dresseur lui avait remis une CT contenant cette attaque Plante. Comme elle se doutait que Marco n’apprendrait pas d’autres attaques de ce type avant un certain temps, elle avait utilisé cette CT sur lui. Ils allaient pouvoir la mettre en pratique pour la première fois.
Marco pris une inspiration, puis recracha à vitesse éclair plusieurs graines. Propulsée comme des balles, elles percutèrent le Tarinor violemment. Il recommença une deuxième fois, puis une troisième fois. Leur adversaire semblait mal en point. Mais alors qu’ils pensaient voir le bout du combat, ce dernier se secoua étrangement, fit un bruit ressemblant à un gloussement, et se remit aussitôt sur ses pieds. Saphir grommela entre ses dents : le Pokémon venait à coup sûr d’ingurgiter une baie soignante.
– Tarinor, Tomberoche ! ordonna Roxanne.
Le Pokémon s’exécuta ; il écrasa son pied dans le sol rocheux, libérant plusieurs morceaux de roches qu’il envoya en direction de Marco. L’Arcko parvint à en éviter un de justesse, mais son pied amputé lui fit défaut dans sa course et il perdit l’équilibre, s’écrasant au sol sur le ventre. Un rocher le percuta avant qu’il n’ait pu se relever, et en quelques secondes, il fut enseveli sous un tas de roches sous les yeux impuissants de Saphir.
– Marco ! appela-t-elle, la boule au ventre.
Quelques secondes passèrent sans qu’il n’y ait le moindre mouvement. Puis, les rochers se mirent à vibrer : d’un geste brusque, Marco parvint à s’extirper du piège du Tarinor en frappant le sommet de sa queue. Sa peau était couverte d’égratignures et de saleté, et même s’il tenait encore debout, il était évident qu’il n’était pas en forme.
A cet instant, la jeune Dresseuse eut peur de laisser son starter continuer le combat. Même avec leur entraînement, il était évident que son handicap l’empêchait d’éviter les attaques, alors qu’il était supposé être rapide. La technique de la queue ne fonctionnait que pour Ecras’Face et cette attaque ne serait jamais efficace contre un Pokémon de type Roche. Avant ce combat, elle était certaine que Marco pouvait facilement s’occuper seul du plus puissant Pokémon de Roxanne, mais la réalité venait de lui rappeler que le gecko vert ne faisait pas le poids. Elle devait se rendre à l’évidence ; il ne pourrait pas gagner ce match.
Saphir prit finalement sa décision... même si elle ne lui plaisait pas.
– Marco, on échange, lui dit-elle.
Quand il se tourna vers elle avec une expression incrédule, elle failli s’en vouloir.
–
Quoi ? s’écria-t-il.
Mais-– Tout de suite, Marco !
Il ferma la bouche et revint vers elle, tête baissée. Saphir se promit de lui expliquer son choix plus tard. Pour le moment, elle devait se concentrer sur le combat.
Truffle fut à nouveau envoyé au combat. Elle sembla surprise de se retrouver là, puisqu’elle pensait avoir joué son rôle, mais quand le Tarinor utilisa une nouvelle attaque Tomberoche elle se concentra sur le match. Elle parvint à éviter les roches, même si elle se prit quelques jets de cailloux, et utilisa Para-Spore pour le bloquer entièrement. Paralysé, il succomba bien vite à des attaques Vol-Vie. L’arbitre siffla la fin du match, annonçant la victoire de Saphir.
– Félicitation, challenger, dit Roxanne en s’approchant, un sourire aux lèvres. Toi et tes Pokémon avez prouvé que vous étiez apte à relever le défi de la Ligue ! Voici le Badge Roche, preuve de ta victoire à l’Arène de Mérouville.
Elle remit à Saphir le Badge ainsi qu’une boîte pour le contenir et où elle pourrait déposer ceux qu’elle gagnerait à l’avenir. Elle lui donna aussi une CT contenant Tomberoche. Saphir la remercia et rappela Truffle dans sa PokéBall, non sans l’avoir remercié pour cette victoire. Elle se tourna vers Marco, mais au lieu de grimper sur ses épaules, il demanda à retourner lui aussi dans sa PokéBall.
Décontenancée par la requête, elle s’exécuta quand même. C’était la première fois depuis leur départ de Bourg-en-Vol que l’Arcko retournait dans sa PokéBall – sans compter les passages dans les Centres Pokémon. Sa décision de tout à l’heure l’avait-elle blessé à ce point ?
Rubis la rejoignit à la sortie de l’Arène. Il avait les yeux pétillants.
– C’était incroyable, Saphir ! s’exclama-t-il. Tu as vraiment assuré pendant ce match !
– Mmh...
Son manqua d’enthousiasme alerta tout de suite son voisin. Il fronça les sourcils.
– Ça va ? Pour quelqu’un qui vient de gagner un match d’Arène, tu fais une drôle de tête.
– C’est Marco, dit-elle dans un soupir, fixant la PokéBall de son plus fidèle compagnon. Je crois qu’il n’a pas apprécié que je l’échange durant le combat.
– Ah... Mais c’est pourtant une stratégie que les Dresseurs utilisent en cas de difficulté, s’étonna Rubis, et c’est normal que tu ais procédé à un échange si Marco ne pouvait pas affronter ce Tarinor. C’est dans les règles du jeu.
– Je sais... J’en parlerais avec lui quand on sera retourné au Centre Pokémon...
Elle espérait sincèrement que son Arcko ne soit pas chagriné, sinon elle s’en voudrait sincèrement.
Le soleil commençait à se coucher à l’horizon. Les deux pré-adolescents marchèrent dans les rues pour rejoindre le Centre Pokémon ; sur le chemin, ils passèrent devant les bureaux de la Devon SARL.
– Au fait, tu es parvenu à leur parler ? demanda Saphir.
– Meh, non, grommela Rubis, les mains dans les poches. Apparemment le patron était occupé. Ils m’ont dit de revenir demain. Tu penserais qu’en annonçant que je suis le fils du Prof. Seko, ils me laisseraient avoir un rendez-vous, mais–
– DÉGAGEZ D’MON CHEMIN ! cria une voix plus loin, suivit des cris de surprises de piétons.
Saphir et Rubis virent une silhouette sortir précipitamment du bâtiment de la Devon SARL, poussant les gens qui entravaient sa course, et foncer en direction de la Route 116 avec un paquet entre les bras. La familiarité de ses vêtements frappa Saphir, qui le reconnu aussitôt. C’était le membre de cette mystérieuse Team Aqua qu’elle avait combattu dans le Bois Clémenti !
Une autre voix s’éleva, criant au voleur. L’homme à la cravate à qui elle était venue en aide tentait tant bien que mal de poursuivre le criminel. En les voyant partir au loin, une petite voix dans la tête de Saphir supplia cette dernière d’intervenir. Il était évident que la victime du vol ne pourrait pas se débrouiller seule.
– Désolé, Rubis, je dois y aller ! s’excusa-t-elle en fonçant à la poursuite du gaillard de la Team Aqua.
– A-attends ! réagit son voisin, décontenancé par ce départ soudain. Qu’est-ce que tu comptes faire ?!
– Je t’expliquerai ! fut sa seule réponse.
Abasourdi, il ne pu que la regarder s’éloigner. Elle voulait vraisemblablement arrêter ce vol, mais Rubis espéra qu’en intervenant, elle ne s’attire pas de problèmes...
- Note de l'auteur:
Notre Chuchmur capturée est une femelle Pudique du nom de Brouhaha!
Par rapport au combat contre Roxanne, je voulais en effet utiliser Marco pour Tarinor, mais sa faible Défense faisait qu'il prenait pas mal de dégât. J'ai du coup décidé de reprendre Truffle pour éviter un drame. C'est un point de mon jeu que j'ai décidé d'utiliser pour le développement du personnage de Marco ~
Et pour l'histoire autour du système de stockage, j'ai toujours eut l'idée que l'énergie des Pokémon pouvait être transformée pour devenir des datas et être stocké dans le système. Dans l'animé, les Pokémon sont transférés à un endroit, mais avec les milliards de Dresseurs dans le monde je me suis dit que, dans la logique, c'était impossible de trouver une place physique ainsi que du personnel pour s'occuper d'autant de Pokémon. Du coup, la solution la plus logique est que ces Pokémon sont stockés en datas, mais que des modérateurs surveillent de près la gestion des équipes et se permettent de libérer les Pokémon qui ont été stockés trop longtemps pour éviter qu'ils soient coincés à vie.
Quant à cette histoire d'énergie, ce sera expliqué plus tard dans l'histoire, mais si vous avez joué aux jeux de la sixième génération vous devriez voir de quoi il s'agit exactement ~